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Eye on Arts
28.12.04
 
When Opera Dreamed of Egypt
Contributed by Charles T. Downey at 1:16 PM | Link to this article
Anne-Marie Romero, Quand l'opéra rêvait d'Egypte (Le Figaro, December 28)


De l'Isis de Lully, en 1677, à l'Akhnaten de Philip Glass, en 1984, en passant par l'inoubliable Aïda de Verdi, pas moins de deux cents créations lyriques – cantates, oratorios, opéras et ballets – ont eu pour thème l'Egypte, dont la moitié exclusivement consacrées à Cléopâtre. C'est dire l'attirance que ce pays et ses mystères, réels ou supposées, ont exercée sur les compositeurs et les librettistes, toujours à la recherche d'un nouvel exotisme ou d'un romantisme déchirant.

«Avec la deuxième collection d'égyptologie après celle du Musée Guimet de Lyon, dit Brigitte Bouret, conservateur du musée et commissaire de l'exposition «L'Egypte et l'Opé ra», il était légitime que nous nous intéressions à ce thème d'une grande richesse d'autant que j'ai pu travailler avec un égyptologue de renom, Michel Dewachter.»

L'Egypte qui attire les compositeurs n'est cependant pas celle des manuels d'histoire, plutôt celle des collectionneurs et des cabinets de curiosités, «une Egypte de pacotille mélangée d'une grande érudition mythologique à travers les textes d'Hérodote et d'Héliodore», explique Mme Bouret. C'est ainsi que certains personnages émergent, comme Isis, symbole éternel de l'épouse et de la mère, ce qui peut aller jusqu'à une assimilation à la Vierge. Lully ouvre le bal avec son Isis, d'après Ovide, mais elle n'aura guère de succès et ne sera jouée qu'une fois. Rameau suivra avec Les Dieux d'Egypte, prétexte à une fête de cour.

Autre héroïne à succès, Cléopâtre. Elle représente l'anti-Isis et instaure le mythe de la femme orientale dangereuse, parée de tous les attraits et de tous les vices. Peu importe les époques. On jouera Cléopâtre dans des costumes d'odalisques du XIXe siècle. Bellini, Massenet, Victor Massé en feront le sujet d'un opéra, Saint-Saëns d'une pièce symphonique, Berlioz d'une cantate. Thaïs, la prostituée repentie et revenue à la foi chrétienne, créée par Anatole France, aura aussi son heure de gloire en inspirant un drame lyrique à Massenet.

Car l'Egypte passe aussi à travers la Bible. Dans ce cas, elle est le méchant, l'ennemi. Une dizaine d'oeuvres traitent du personnage de Joseph, dont la plus célèbre est le Joseph en Egypte de Méhul, créée en 1807 et reprise un siècle plus tard à l'Opéra de Vienne.

Mais la plus belle fusion entre l'Egypte et la musique demeure le dernier chef-d'oeuvre de Mozart, La Flûte enchantée, thème maçonnique dans lequel apparaissent les principaux éléments de cette philosophie – l'air, le feu, le silence, la nuit – avec une nuance de taille toutefois puisque Mozart fait de la Reine de la Nuit un personnage maléfique, alors qu'elle était dans la mythologie égyptienne une étape bienfaisante dans la course du soleil. L'assimilation à l'Egypte fut telle qu'au début du XXe siècle on redonna La Flûte à Paris en l'intitulant Les Mystères d'Isis...

Comment muséographier un tel sujet ? Brigitte Bouret s'en tire fort bien avec des objets significatifs de l'égyptolâtrie qui régna au XIXe et au début du XXe siècle : des jardinières de Gallé représentant Isis en milan femelle, des affiches d'opéra mélangeant avec allégresse temples grecs et obélisques, et surtout d'extraordinaires costumes, d'une loufoquerie totale. On sourit en voyant Pierre Loti déguisé en Osiris pour une soirée costumée ; on s'étonne devant les vêtements gréco-égyptiens de Lully et les innombrables «turqueries» dont on revêtait des héros censés vivre à l'époque pharaonique. Même le grand Mariette Pacha, père de l'égyptologie «sérieuse», dessina pour Aïda des costumes qui sentent un peu le soufre, comme des babouches aux pieds de Radamès !

Mais l'oeuvre la plus marquante de ce mariage égypto-lyrique est tout de même Aïda, commandée à Verdi par les Egyptiens pour célébrer l'ouverture du canal de Suez et qui fut finalement créée pour l'inauguration de l'Opéra du Caire en 1881. Aïda fit un triomphe : 32 rappels ! Et l'air des Trompettes fut même choisi, durant un temps, comme hymne officiel de l'Egypte...

Jusqu'au 6 février 2005, au Musée des Beaux-Arts et d'Archéologie J.-Déchelette, 22, rue Anatole-France, Roanne (42). Tél. : 04.77.23.68.77. Catalogue : 30 €.


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